Portrait Cynique

Portrait Cynique : un recueil de 8 nouvelles écrites par Jérôme Duplessis. Découvrez un univers influencé par le roman noir et la culture populaire : les personnages sont confrontés à des situations jouant avec l'angoisse et le questionnement intérieur. Chaque nouvelle explore une histoire différente avec pour toile de fond, le monde contemporain ou la fiction d'anticipation. Une lecture atypique pour un public sachant apprécier les idées dérangeantes.

Extraits :

NO FUTURE / Regarder Gilda s’exhiber devant son terminal m’excitait plus encore que l’illégalité de cette épopée érotique. Ses yeux luisaient autant que sa tenue et je m’interroge sur la suite possible que nous aurions pu donner à ce préambule si la liaison n’avait pas été interrompue par le satellite en charge de veiller, censurer et sanctionner les abus de nos congénères dégénérés. Nos lointains ancêtres auraient probablement connu le bagne ou le pénitencier. Aujourd’hui, notre civilisation se prétend plus fine, consciente qu’un criminel en puissance rapporte plus d’argent en liberté qu’en détention. Puisque j’ai osé braver les règles de l’hygiène psychologique, je suis un criminel.

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DETOURNEMENT / Attiré par le vacarme, prévenu par un serveur, Max parvint à l’étage au moment où le soufflé s’écroulait, heurtant violemment Belinda qui dévalait les marches, la pommette droite rougie par un coup égaré, des larmes – de déception – aux yeux. Essoufflée, Ingrid retenait les siens de cracher sa haine. Ce n’était pas un plan de carrière ou une chance qu’elle avait perdue mais l’essence même d’une relation : la confiance. Ce que Vincent Lucas avait perdu un matin par malveillance. Ce « pourquoi » qu’aucun calcul ne parvient à reconstruire. Ce qui le menait depuis à semer la zizanie, par amusement autant que par vengeance.

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JOURNAL, MON BEAU JOURNAL / 5h52. Le jour se lève. Les couleurs sont chaudes et saturées. Comme celles qui défilent sur l’écran : c’est ma vie qui s’y déroule. Je dors. Je lis. Je délire. Je me vois malade. Je me vois pleurer. Je me regarde baiser. J’ai gerbé devant mes chiottes. L’image est nulle et déformée mais elle est réelle : c’est moi et bien moi. Image dépourvue de sons. Suffisant : mon épiderme connaît la chair de poule et ma main l’hésitation. Je me vois t’écrire. Mon index est sec : fini de tâcher tes pages avec ma salive et mon sang. J’ai mal. Doublement. J’ai peur. Simplement. Whisky. Triple…

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JOKE / Les aboiements d’un chien rythment mes pas. Je suis à mi-chemin. J’entends un second moteur. Le bruit cesse puis revit. Mon estomac se manifeste. Je n’ai rien avalé depuis hier soir. Rien de nourrissant en tous cas ! Je souris en repensant à ce matin. Le froid gerce mes lèvres humides de la salive accumulée sur le filtre à poison. La voiture ralentit, je me retourne instinctivement, une ombre se précipite sur moi. Le silence routinier se déchire, ma pochette chute et mes mains se portent au secours de ma gorge. Je ne parviens à rien, la cagoule est serrée. Je suis aveugle et affolée. J’entends un bruit sourd. Deux à tordre mes bras pour m’astreindre à ne pas lutter, c’est trop. Je hurle. Enfin ! Je n’ai plus que ça à faire.

(…)

DON DE MORT / Alors qu’elle parvenait à rire en sa compagnie, ce face à face solitaire avec un lit la tenaillait et lui ôtait l’espoir d’apprécier sa vie. N’avait-elle pas ressenti un profond malaise lors du ballet ? Aurait-elle pu s’empêcher de trembler durant le dîner ? Ne s’était-elle pas humiliée en proposant d’échanger un baiser contre une goutte de vin ? Avait-il répondu lorsqu’elle avait demandé « la raison de cette mise-en-scène » ? Vexé, il l’avait punie, l’abandonnant à ses doutes. Emmanuelle comprit progressivement qu’elle était désormais la seule à ratiociner ; sans être en mesure de comprendre Jérôme, horloger d’une mécanique rituelle qui minutait sa vie et le soulageait d’une partie de son fardeau.

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Nous avons vérifié que ce livre était gratuit le 08 déc. 2014 - 02:53 Détails de l'offre