Saint-Louis. Missouri.
En ce 28 octobre 1965, les charpentiers achevaient la construction de l'arche en posant l'ultime tronçon. Haut de 192 mètres, le ruban blanc d'acier conçu par l'architecte Eero Saarinen marquait la porte de l'Ouest. Le Gateway Arch n'était que le premier évènement dans la journée de Norma Svart, dix-huit ans. Un autre évènement sous la forme d'une proposition allait changer sa vie : servir de cobaye ou de pionnière - cela dépendrait de son degré de motivation, effet Hawthorne oblige - pour l'Étude de la Réponse Sexuelle Humaine des professeurs William Howell Masters & Virginia Eshelman Johnson. Soit rencontrer des partenaires au sein d'une équipe médicale chargée d'étudier les moindres variations de l'acte sexuel.
Norma était élancée, mince - presque trop -. Son père disait qu'on lui voyait les côtes. Ses cheveux blond clair légèrement bouclés caressaient ses épaules. Ses chignons révélaient la noblesse de son front, le dessin délicat de ses oreilles, la grâce de sa nuque. Elle avait des seins en poire, des aréoles sous tension, des électrodes comme mamelons. Ces protubérances la complexaient. Ses yeux bleus glacés intimidaient. Sa bouche intelligente et sensuelle pouvait s'imprégner de cruauté. Sa peau pâle souffrait du soleil. Ses traits étaient anguleux, son nez droit, à peine retroussé.
L'air d'une infirmière nazie.