Ce chapitre tiré du POLYCARPE illustre le déclin du pouvoir politique entamé à la fin de la Seconde Guerre mondiale. Rien de tel alors, pour suivre cette évolution, que d’observer les campagnes électorales en vue de l’élection à la Présidence de la République, temps fort de la vie politique de notre pays depuis que Charles de Gaulle a décidé que cette élection se ferait au suffrage universel direct.
Le temps des illusionnistes : ainsi est titré ce chapitre. Illusion, en effet, qui était celle de notre position dans le monde, en son centre, entretenue par celui qui nous représentait alors, le grand Charles, qui savait à merveille porter haut nos couleurs. Illusion dans laquelle, lui-même, de Gaulle, revenu au pouvoir, s’entretenait pour ne pas désespérer du pays, des Français, qu’il traitait de veaux dans ses moments d’abattements, et de l’époque où il fallait composer avec les autres pour rester dans la course qui s’engageait au plan économique mais aussi au plan politique, ces domaines étant désormais étroitement liés et gérés hors du pays, même si le machin, comme il appelait l’ONU, ou le FMI n’avaient pas encore l’influence qu’ils ont acquis depuis.
Et puis s’éloignait la guerre, celle des conquêtes (bannies par les instances supranationales ), et celle qui amenait les populations à défendre leur sanctuaire, l’arme de dissuasion nucléaire s’en chargeant. Ainsi, dès 1946, était stoppé l’élan de l’Histoire et s’achevait l’éclipse de la fonction guerrière laissant place à une ère nouvelle, totalement inédite : une ère posthistorique.
Or, aux temps des sociétés historiques, quand les guerriers faisaient encore la Loi, la légitimité du pouvoir était intimement liée à cette fonction guerrière, les princes et les rois étant choisis parmi la caste des guerriers avant que les peuples désignent ceux par qui ils seraient défendus.
La compétition économique ayant remplacé la guerre, nos hommes politiques ont vu s’étioler leur pouvoir lequel reprend systématiquement quelque consistance dès lors qu’un conflit armé engage le pays. D’ailleurs, de Gaulle lui-même dut son retour aux affaires à de pareilles circonstances, à la faveur d’un conflit devenu inextricable en Algérie.
Aussi, au fil des élections présidentielles, s’affiche la lente décrépitude du pouvoir réel de notre représentant suprême, le chef de l’État, masquée par les promesses non tenues et les techniques de communication.
Ce chapitre est celui d’un désillusionné ; il peut paraître pamphlétaire et cruel alors qu’il n’est que le constat impitoyable d’une réalité pitoyable quand se dévoilent les postures et les impostures des uns et des autres, candidats et élus.