Parfois je restais là, allongé sur l’herbe verte d’un parterre accoté à une maison de campagne. La pelouse bruissait sous le vent qui effleurait chaque brin de sa chevelure émeraude. Mes petits doigts s’emmêlaient dans les cheveux coupés courts. Je caressais avec tendresse le crâne sur lequel je somnolais. J’écoutais la respiration des arbres qui bordaient ma zone d’inconfort. Je percevais alors l’arrivée discrète d’un insecte.
J’entendais cette sauterelle approcher à pas feutrés afin de murmurer à mon oreille l’histoire d’un monde qui m’était inconnu. Je pouvais sourire sans crainte. Alice avait son lapin blanc, Pinocchio son Jiminy.
Ma sauterelle me poussait à devenir explorateur, à battre la campagne en suivant ses bonds, émerveillé. Je restais là, à moitié endormi, et j’écoutais son plan d’évasion.
Il me fallait du temps pour revenir de mes songes. Je me levais encore à moitié étourdi et chancelant. Le sourire au bord des lèvres, j’avançais alors pas à pas vers ma destinée. Je n’avais plus qu’à franchir la frontière feuillue qui me séparait d’un ailleurs plus enviable.
Sans bagage ni adieu, je quittais mon pays afin de rejoindre la quiétude d’un autre plus accueillant. Je laissais derrière moi les cris et les pleurs. J’abandonnais la violence et la peur. Je tendais les bras vers une vie, éphémère, de bonheur parfait.
A moi la liberté !