Quand Victor Méric (1876-1933) propose "La guerre qui revient, fraîche et gazeuse" à ses éditeurs, il se fait renvoyer de partout. Le livre, c'est pour ceux qui pensent bien. Alors il le publiera lui-même, aux éditions Sirius, en 1932, et ce sera le dernier livre de cette grande voix, cette grande pensée, nerveuse et indocile.
Et c'est pour cela que nous revenons à lui. La guerre ? Elle nous entoure. Et menée en notre nom. Et imbécile partout, soumise au fric et aux religions comme elle le fut toujours.
Ce n'est pas d'aujourd'hui que l'homme pense la guerre. Ni que de grands auteurs tentent vainement de penser contre la guerre.
Méric a traversé la première guerre mondiale : il la connaît dans son corps, son épouvante.
Ce qui est terrible, dans ce livre écrit en pleine montée du nazisme, citant Hitler mais consacrant un magnifique chapitre aux pacifistes allemands ses frères (Ernst Johannsen), c'est qu'il démonte comment, en 1932, dans tout le monde occidental, la pensée d'une arme de destruction massive – côté anglais, américain, allemand, français – est en place, indépendamment du vecteur qui la portera.
Méric parle de guerre chimique : les gaz n'ont pas influé sur la seconde guerre mondiale, mais ce qu'il décrit ici correspond parfaitement aux guerres technologiques d'aujourd'hui, et nous aident nous aussi à ce que nous disions "Non" (titre d'un des chapitres). Mais ce qui fut imposé à Hiroshima était écrit avant l'invention de l'arme atomique.
Ce n'est pas pour ses qualités visionnaires que nous revenons faire jouvence à la pensée libertaire de Méric, et ce coup de poing contre l'histoire. S'il ne fut pas recevable, en 1932, c'est bien pour la qualité même de cette pensée, l'appui qu'il nous faut pour être ensemble dans le présent qui déraille.
Revenir à Méric, c'est pour la folie d'aujourd'hui, le danger qu'on y court, et que la folie des hommes puise aux mêmes causes. Le pamphlet, ici, est solide. Il est pour nous.
FB