Les souvenirs précis se sont estompés rapidement, mais les impressions restent très puissantes et pour longtemps. Ce séjour parisien a marqué le franchissement d'un nouveau seuil, inattendu, original, inimaginable, d'une intensité jamais égalée et d'autant plus surprenante que tout nous sépare dans cette clandestinité. Depuis mon retour, le manque de toi est resté si vivace, jusqu'à ce jour, veille de notre prochaine rencontre, dans notre nid, pour vingt quatre heures, pour notre Saint-Valentin à nous, rien qu'à nous.
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Milena, mon adorée, ma divine. Arrivée clandestine à Paris mardi matin avec un simple bagage à main. Atterrissage à Orly à 9h25, taxi, chambre 25 à notre hôtel. A peine mon modeste bagage déposé, je suis allé me détendre, non loin de ta Fac, en terrasse, espérant t'apercevoir au détour d'un trottoir, entre deux cours. Un texto laconique pour t'indiquer le numéro de la chambre. Ton heure de sortie pour unique réponse. Plus bref que cela, impossible.
A midi, rapide approvisionnement au Monop du coin, puis retour à notre Hôtel des Beaux-Arts, notre nid, où tu m'as rejoint directement. Nos désormais traditionnelles salades de pâtes nous attendaient sur la console, la demi-bouteille de Champagne dans le mini-bar, mon long manteau d'hiver sur un cintre dans la penderie en bois exotique. Tu portais une robe au dessus du genou et serrée à la taille d'une petite ceinture en laine noire avec un noeud dans le dos, des collants noirs aux reflets violacés, un manteau noir et ton grand sac de cours noir en bandoulière. Tu as gratté à la porte de la chambre, je t'ai ouvert. Tu m'as imposé cette distance de sécurité que je respecte, chaste baiser du bout des lèvres. Tu as fait durer l'attente. Après notre déjeuner frugal sur le bord du lit, face à la vue sur le Seine, je suis parvenu à te renverser en arrière. De bisous en baisers, d'effleurements en caresses, de plus en plus poussés, j'atteignais enfin tes seins, puis retirais mon pull, ton collant, mon jean, ton string, mon t-shirt et mon boxer. Je t'ai fait l'amour comme ça, dans cette robe noire à la fine dentelle, la tête dans le vide, ta chevelure en arrière, face à la fenêtre, allongée sur le dos, le soleil baignant notre étreinte. Je t'ai fait l'amour sans trop te forcer. Je le voulais tant. Tu m'avais pourtant dit « Non ! » en me sentant venir en toi, me repoussant avec tes jambes. J'étais sorti de toi, mais n'avais pu résister et t'avais reprise de plus bel. Ce « Non » c'était alors transformé en « Oui, encore, plus fort ! » et j'avais éjaculé, abondamment, longuement, tout au fond de toi. Il ne pouvait en être autrement. C'était magnifique. C'était magique. Je sentais pourtant une forme de colère contradictoire en toi. « Je t'avais dit Non » m'as-tu répété à plusieurs reprises en prenant ta douche. Et je t'avais répondu « Désolé, mais tu semblais aimer et en redemander ». Tu es partie le sourire aux lèvres, les yeux enflammés et réprobateurs.