«(…) Chaque conte de fées est un système relativement clos, qui se traduisit en une série
d’images et d’évènements symboliques. (…) Tous les contes de fées entreprennent de décrire
un seul et même facteur psychique, mais un facteur tellement complexe et significatif, si difficile
à se représenter sous tous ses différents aspects, que des centaines de contes et des milliers
de versions (comparables aux variations d’un thème musical) sont nécessaires pour que ce
facteur inconnu pénètre dans la conscience, sans que le thème en soit pour autant épuisé. Ce
facteur inconnu est ce que Jung appelle le Soi qui est la totalité psychique de l’individu en
même-temps qu’il est aussi, paradoxalement, le centre régulateur de l’inconscient collectif. Or
chaque individu, chaque peuple a sa propre façon de faire l’expérience de cette réalité psychique.
Les divers contes de fées offrent des esquisses générales des différentes phases de
cette expérience. Certains s’attardent davantage aux stades du début qui concernent
l’intégration de l’ombre et ne donnent qu’un bref aperçu de ce qui suivra. D’autres s’étendent
sur l’expérience de l’animus ou de l’anima ainsi que sur celle des images du père et de la mère
qui en constituent l’arrière-plan, et glissent aussi bien sur les précédents problèmes concernant
l’ombre que sur la suite. D’autres encore développeront le thème du trésor inaccessible ou impossible
à obtenir et d’autres expériences centrales du même ordre. Il n’existe pas de différence
qualitative entre ces contes, car dans le domaine archétypique il n’y a pas d’échelle de
valeurs, pour la bonne raison que chaque archétype est, dans son essence, l’un des aspects de
l’inconscient collectif en même temps qu’il représente toujours la totalité de ce dernier.»
(“L’Interprétation des Contes de Fées” par : Marie-Louise von Franz, 1995, pp. 12 - 13)