Il faut se rendre à l’évidence : nous autres, qui sommes nés entre 1961 et 1975 (je vous expliquerai ces chiffres), nous sommes une génération caractérisée par l’impuissance politique, la quasi-absence de personnalités marquantes, le manque de notoriété, l’indifférence des autres générations. Nous sommes à la fois trop jeunes et trop vieux, une génération sans consistance.
Ce type de génération ratée se produit de temps en temps. Cela ne veut pas dire que cette génération soit plus bête ou plus aveugle que la précédente ou celle qui lui succède. Elle peut même être aussi solide, voire plus solide intellectuellement que les autres générations. Seulement, elle n’a jamais eu de vrai pouvoir et elle n’en aura jamais. Génération Cassandre. Mais cette génération ratée est en même temps une génération-charnière, une génération au rôle décisif.
Cette situation est originale parce que la génération ratée et la génération décisive, en règle générale, sont différentes. Or, aujourd’hui, elle coïncident. La génération sacrifiée – sans pouvoir – et la génération décisive – la passerelle entre deux mondes différents – sont la même.
Soyons donc un peu optimistes : les ratés ont une rôle historique à jouer, et même un rôle capital ! Discrets mais efficaces. Modestes mais incontournables. Et c’est ce que je vais expliquer.